La crise des gilets jaunes l’avait démontré, et ses remous infinis l’ont confirmé : défiant à l’égard des cadres de la nation, les Français désirent une démocratie de proximité. Le maire est leur élu de prédilection. Ces édiles, les élections municipales les désigneront d’ici quelques semaines.
Les maires… Un long processus de réajustement des excès de la décentralisation avait peu à peu rogné leurs prérogatives en matière d’urbanisme et d’architecture. Et puis par un dangereux effet de balancier, les voilà à nouveau proches des pleins pouvoirs. On n’énumérera pas les dérogations successives, couronnées notamment par la loi Elan, néfaste entre toutes : l’avis désormais parfaitement superflu des architectes des Bâtiments de France, celui carrément annulé des organismes de contrôle des sites naturels ou remarquables, la possibilité de prendre un arrêté de péril à l’endroit de n’importe quel édifice, fut-il un palais médiéval… Le maire est maître chez lui ; seul ou presque, il dicte leur environnement immédiat à ses administrés. Or, dans la plupart des cas, de quoi rêve-t-il, ce petit seigneur de la République ? De parkings. En revanche, une église abandonnée des fidèles lui donne des cauchemars. Surtout lorsqu’elle est classée. Il sacrifiera sans ciller la seconde au premier.
Il reste vulnérable, cependant, ce baron d’élection, faute de culture générale et de connaissances techniques bien souvent… faute de fermeté, aussi, face aux immanquables tentations coupables. L’architecture, pourtant, est le seul des beaux-arts auquel chacun se trouve confronté quelle que soit sa condition. Riche ou pauvre, fraîchement débarqué ou cul-terreux, ignorant ou érudit, on n’y échappe pas. Pas plus qu’on n’échappe à l’urbanisme. Ou à l’environnement urbain, si l’on préfère. Les nécessités globalisantes de la discipline guident chacun de nos pas, conditionnent nombre de nos réflexes civiques… L’urbanisme se conçoit comme un tout, ce qu’avait saisi Haussmann échappant ici à Mme Hidalgo.
Le maire est maître chez lui ; seul ou presque, il dicte leur environnement immédiat à ses administrés.
Nicolas Chaudun
Voilà déballés autant d’aspects qui nous disent l’importance capitale des élections à venir. Seulement, les professions de foi passent trop souvent sous silence les intentions des candidats en matière d’urbanisme, d’architecture, de mise en valeur du patrimoine, monumental ou non. Paysages et patrimoine ne sont-ils pourtant pas des enjeux économiques ? Ne préservent-ils pas de précieux savoir-faire ? Ne vitalisent-ils pas les « territoires » ? Alors, pourquoi ce silence ? Que les candidats nous en parlent donc ! et vite ! et tous ! Car l’environnement visuel, le « chez-soi du dehors », est le premier bien commun que nous partageons tous, sans exception !