Dans notre édito du 6 mars 2020, nous nous faisions l’écho de la conférence de presse «Non à la cacophonie, pour une transition énergétique acceptée par tous les citoyens!» organisée la veille par neuf associations nationales engagées dans la défense de l’environnement et du patrimoine (Demeure historique, VMF, Fédération Environnement Durable, Maisons paysannes de France, Patrimoine Environnement, Rempart, Sauvegarde de l’Art Français, Sites & Monuments, Vent de Colère). Philippe Toussaint, le président des VMF avait annoncé que celles-ci s’adresseraient « directement au président de la République [car] nous souhaitons que la parole présidentielle soit mise en pratique ». L’épidémie de coronavirus-Covid 19 était en train de se transformer en pandémie, et le confinement décrété dix jours plus tard. Bouleversant leur stratégie d’offensive, comme toute chose.
Une lettre ouverte a finalement été adressée au chef de l’État le 18 juin 2020, pour que « les paysages de France […], qu’ils soient exceptionnels ou du quotidien [… et qui] forment le cadre de vie des Français et l’écrin de nos monuments les plus précieux, ne soient pas sacrifiés à l’éolien dont l’impact environnemental est globalement négatif. » Comme le soulignent les signataires de la missive, durant ces trois mois – oh ! combien particuliers – la situation n’a fait que s’aggraver. D’une part, les programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE) sont venues entériner l’implantation soit disant « harmonieuse » de 6 500 nouveaux aérogénérateurs, toujours plus hauts et plus puissants, d’ici 2028. Et ce, au mépris injurieux des résultats de la consultation citoyenne préalable établissant que 70% des Français se déclarent hostiles à l’éolien. D’autre part, de – trop – nombreux projets de parcs éoliens ont été confirmés, dont plusieurs dans des lieux aussi emblématiques que la montagne Sainte-Victoire, l’estuaire de la Gironde ou le pays de Proust. Et ce, en dépit de l’opposition des riverains, des maires, des commissaires enquêteurs et des architectes des Bâtiments de France.
Durant ces quatorze semaines, le fléau éolien s’est bel et bien radicalisé. En totale contradiction avec ce qu’avait laissé entendre le président de la République le 14 janvier dernier, et la ministre de la Transition écologique et solidaire quelques semaines plus tard. En incohérence également avec la prolifération des plaintes déposées par les citoyens victimes des 8 000 machines déjà implantées sur le territoire français. « Pollution visuelle et sonore, de jour comme de nuit », « impact sur la santé des personnes » comme sur celle des animaux, « effondrement de la valeur des biens immobiliers », « artificialisation irrémédiable des sols », « sous-estimation manifeste du coût du démantèlement », « caractère intermittent, aléatoire et imprévisible de l’électricité d’origine éolienne, qui oblige à recourir à des énergies de substitution, gaz ou charbon, lesquelles augmentent les rejets de CO2 » : les nuisances provoquées par les générateurs sont scrupuleusement détaillés dans la lettre. Qui rappelle aussi que le Royaume Uni, l’Allemagne, le Danemark et l’Espagne ont déjà donné un coup d’arrêt à la prolifération éolienne en renonçant à leurs systèmes d’aides – au vu du coût prohibitif de cette source d’énergie et de son inefficacité en termes de réduction d’émission de CO2.
Autant de constats navrants qui auront eu au moins le mérite de rallier trois nouvelles voix à la cause. Et non des moindres puisqu’il s’agit de Stéphane Bern et des associations internationales French Heritage Society et Europa Nostra. De bonne volonté, les douze signataires assurent au chef de l’État être à ses côtés « pour construire une autre voie conduisant à une transition écologique acceptée par tous les citoyens ». Rappelant à son bon souvenir leur projet alternatif sur l’énergie déposé le 17 janvier, ils lui suggèrent trois mesures à mettre en œuvre au plus vite. D’une part, accroître la distance minimale entre les générateurs et les habitations à dix fois la hauteur des machines. D’autre part, « rendre obligatoire l’avis de l’architecte des Bâtiments de France dans le cadre de l’instruction de projets d’implantation d’éoliennes dans un rayon de 10 km des monuments historiques et des sites protégés, ainsi que celui de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture dans le cas de recours devant le préfet de région ». Enfin, « réduire le prix de l’achat de l’électricité produite par les éoliennes en appliquant la procédure des appels d’offres à tout projet d’installation d’éoliennes », tel que le préconise l’Union européenne.
Des mesures bénéfiques à « imposer d’en haut » selon les vœux mêmes d’Emmanuel Macron, ayant constaté coup sur coup le 14 janvier dernier « la capacité à développer massivement l’éolien est réduite » et « le consensus sur l’éolien est en train de nettement s’affaiblir ». Le temps presse pour stopper un fiasco annoncé et malheureusement déjà en marche…