Cet été, racontez-nous la France #9 : sur les chemins d’Urbain V

Date de publication : 11/08/2020

Temps de lecture : 5 minute(s)

Souhaitant se « ressourcer loin des miasmes et de l’écume politico-médiatique », Alain et Martine se sont lancés dans une grande aventure de 330 kilomètres et 17 jours de marche à travers la Lozère. L’objectif : marcher sur les traces du fameux pape lozérien Urbain V. Ils nous racontent leur périple et leurs découvertes pour ce neuvième épisode de notre série « Cet été, racontez-nous la France ! ».

Après 50 années dans l’édition, j’avais fait le vœu d’effectuer avec mon épouse une longue marche. C’est la lecture du magazine VMF, consacré au patrimoine, qui nous a soufflé notre destination : la Lozère. Grâce notamment à un article consacré à Guillaume Grimoard (1310–1370), qui deviendra le sixième pape d’Avignon sous le nom d’Urbain V.

Ce bénédictin humaniste issu d’une famille lozérienne a en effet laissé de nombreuses traces architecturales entre Aubrac, Cévennes et Gard. Un chemin a été créé, voici quelques années, qui permet de marcher sur les traces de ce grand homme et de découvrir sa vie et son œuvre. De Nasbinals, sur le plateau de l’Aubrac, à Avignon, en traversant les Cévennes, ce parcours se dessine entre prairies d’altitude, forêts de sapins, châtaigniers, chênes, oliviers, vignes et garrigues. À raison d’une moyenne de 20 à 25 kilomètres par jour, il permet de découvrir des paysages grandioses et variés. Mais aussi une nature quasi intacte et des ensembles architecturaux très préservés : abbayes et châteaux, collégiales, chapelles et ponts.

Et tout au long du voyage, des rencontres inattendues… Comme cet ex-clarinettiste de l’Orchestre national belge qui nous a accueillis dans un gîte façon « maison d’artiste » situé à Grizac, petit hameau perché à 1 000 mètres d’altitude sur le mont Lozère, qui vit naître le pape lozérien. Ou encore Sophie et Martin, charmants propriétaires d’un mas exceptionnel de calme et de bon goût, « Les Cessenades », situé au bout du monde, à Ventalon dans les Cévennes.

Nous garderons aussi le souvenir de notre rencontre avec ce félibre ambassadeur de la Lozère et sa femme, lointains descendants des troubadours qui, à près de 70 ans, parcourent toujours les villages pour proposer des spectacles chantés et mimés. Sans compter les innombrables rencontres au bord des routes avec des personnes que le randonneur intrigue et qui souhaitent échanger sur le temps qui passe. La factrice aussi, qui nous encourage d’un coup de klaxon, les cafés qui nous rafraîchissent sous la tonnelle…

Beaucoup de lieux associatifs permettent dans ces régions désertées de recréer les liens indispensables aux hommes. Nous en avons bénéficié un jour où nous cherchions un hébergement à Mialet, dans le Gard. Nous entrons Chez Mialet, épicerie, buvette, restaurant, expositions, spectacles, tenu par une salariée permanente et des bénévoles, de charmantes dames qui se mettent en quatre pour nous trouver un logement chez l’habitant. Des péripéties qui nous permettront de rencontrer Jacqueline, adepte du woofing, dont l’accueil chaleureux dans un mas du XVIe siècle et les confitures du petit déjeuner hanteront longtemps nos souvenirs !

Autre expérience étonnante que celle du retour à la « civilisation agitée » à l’approche d’Avignon, entre rocades, zones pavillonnaires et industrielles, où le piéton n’a pas sa place, et cette impression de passer du statut de randonneur à celui de vagabond… La vision des remparts et du Palais des papes nous rassérène… Le calme et la sérénité sont aussi les récompenses de cet effort qui nous recentre sur l’essentiel. Les deux premiers jours de cette randonnée ont été difficiles : l’impression d’avoir 120 ans à l’étape, puis le rythme s’installe. Stimulés par les découvertes multiples au fil du chemin nous semblons rajeunir… En un mot et pour conclure : marchons !

Alain Zind

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