TRIBUNE – Invitées le 26 janvier 2021 par le Ministère de la transition écologique à prendre connaissance des dernières décisions du Conseil de défense écologique du 8 décembre 2020, plusieurs associations du groupe de travail « Pour un développement harmonieux de l’éolien terrestre » dénoncent des annonces trompeuses qui vont encore amplifier le rejet de l’éolien dans les territoires. De nombreux sujets majeurs n’ayant pas été abordés, elles demandent la poursuite du groupe de travail.
« La fédération Patrimoine-Environnement, le collectif Toutes nos Énergies-Occitanie-Environnement, le collectif national Énergie-Vérité et l’association VMF ont constaté que la plupart des décisions présentées, loin de poser les bases d’un développement harmonieux, renforcent le rejet de l’éolien par la population des territoires ruraux. Ce phénomène s’est amplifié en 2020 pour atteindre tous les territoires, ne se limitant plus à ceux déjà à forte densité d’éoliennes.
« Cela fait 21 ans qu’on nous vaccine à grands frais contre le réchauffement climatique avec des éoliennes », a déclaré Kléber Rossillon, représentant de Patrimoine-environnement. « Il y a des effets secondaires catastrophiques pour les espaces naturels qui sont artificialisés comme ils ne l’ont jamais été, pour la biodiversité, et pour le cadre de vie des habitants. L’efficacité du remède dans la lutte contre le réchauffement climatique est très douteuse. Et maintenant, il y a une réaction de rejet totale. Le taux de refus des projets lors des enquêtes publiques dans toute la France, dépasse 70%, et atteint jusqu’à 96% ».
Puisque la population s’y oppose, il semblerait qu’on veuille le lui imposer !
Vers des quotas d’éoliennes obligatoires ?
A la plus grande surprise des associations, le Ministère de la transition écologique a annoncé son intention d’introduire la déclinaison régionale des objectifs chiffrés de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) dans le projet de loi “Climat et résilience”. Les préfets de région établiront une cartographie des zones propices qui servira de support à cette obligation légale.
Des annonces trompeuses
La première mesure mise en avant par le ministère de la transition écologique concerne la pollution par les balises lumineuses. Son calendrier de déploiement dans le parc existant est promis pour dans six mois. L’objectif visé d’une extinction complète des lampes rouges clignotantes qui polluent le ciel nocturne et le milieu naturel manque totalement de réalisme. La sécurité aérienne ne le permettra pas. Nos associations souhaitent que le groupe de travail suive les expérimentations. Dans l’attente, elles demandent l’arrêt du déploiement des petits parcs de moins de cinq éoliennes qui nécessitent le même balisage lumineux que les grands.
Le ministère a présenté son arrêté du 22 juin 2020 portant sur l’amélioration du recyclage des éoliennes et de leurs fondations. Il contient une disposition piège qui délie les opérateurs de leur obligation de remise en état intégrale des terrains, pour peu qu’ils démontrent que l’excavation totale du béton présente un bilan environnemental défavorable, ce qu’ils ne manqueront pas de faire. Des centaines de milliers de tonnes de béton seront ainsi abandonnées dans la nature, alors que la lutte contre l’artificialisation des sols est une priorité affichée du gouvernement. Ceci représente un recul important pour l’environnement, les associations demandent qu’il soit revenu sur cette dérogation.
Les vrais sujets brutalement écartés
Plus grave encore, nous constatons que 19 mesures entrant dans l’objet du groupe de travail éolien ont été escamotées. Il s’agit des projets portant sur l’acceptabilité et sur la protection des paysages et du cadre de vie. Le ministère a ainsi écarté les préoccupations publiquement exprimées par le Président de la République à Pau le 14 janvier 2020, alors même que les associations ont répondu aux préoccupations du Président par des propositions concrètes, dans un courrier adressé à Emmanuel Macron le 18 juin 2020.
Ainsi, il n’y a rien sur la distance minimale entre les éoliennes et les habitations. Elle devrait être portée à 10 fois la hauteur de l’éolienne, pale comprise, comme c’est le cas en Bavière ou en Pologne.
La protection des monuments historiques est inopérante. Ainsi le projet de Champagne-et-Fontaine en Dordogne est en covisibilité avec 23 monuments historiques ! Il faut rendre obligatoire l’avis de l’architecte des bâtiments de France et de la C.R.P.A dans un rayon de 10km des monuments historiques et des sites protégés.
Le rôle des collectivités territoriales : remettre le Département au centre de la concertation
Le Conseil de défense écologique a reconnu le phénomène de saturation de l’éolien terrestre qui touche de nombreux départements. Il provient de la stratégie d’implantation des éoliennes, qui est un mitage géré au niveau des communes et des communautés de commune, alors que les enjeux d’acceptabilité et écologiques sont au niveau départemental, comme le groupe de travail l’avait mis en évidence. Or le projet d’une « cartographie des enjeux » établie au niveau départemental a disparu des documents présentés !
Nos associations demandent que les Conseils départementaux soient intégrés dans cette démarche de cartographie, qu’ils sont les plus à même d’évaluer. En effet, dans l’organisation territoriale française, les départements ont la compétence partagée de l’attractivité territoriale et du tourisme.
Elles demandent également que cette cartographie intègre les enjeux humains d’acceptabilité ainsi que ceux de l’environnement et de la biodiversité.
Mettre fin aux avantages exorbitants de l’éolien terrestre
Depuis 21 ans, à toute heure du jour et de la nuit, quelle que soit la demande, et quoi qu’il en coûte, l’électricité produite par les éoliennes est achetée à un prix indépendant du prix du marché. Ce prélèvement sur l’économie, maintenu malgré la crise en 2020, est la véritable cause de la pression qui s’exerce sur les territoires. Il alimente l’énorme bulle boursière des compagnies d’éoliennes.
L’Allemagne, l’Espagne ont abandonné ce mécanisme de subvention. La France a commencé de le faire pour certains contrats d’achat d’électricité photovoltaïque, sans avoir à indemniser les producteurs. Compte tenu de la faible efficacité de l’éolien terrestre dans la lutte contre le réchauffement climatique, il est temps que la France mette à armes égales les enjeux économiques et ceux de l’écologie et du patrimoine. Le mécanisme de subvention doit être arrêté. La procédure des appels d’offres doit être appliquée à tout projet quel que soit le nombre d’éoliennes.
Reprendre une vraie concertation
Tout en affirmant leur solidarité avec les associations présentes sur le terrain et au niveau national, qui ont signé la lettre au Président de la République, nos associations demandent la prolongation de ce groupe de travail national sur l’éolien terrestre pour suivre, corriger les décisions annoncées et reprendre les sujets qui n’ont pas abouti. »
La fédération Patrimoine-Environnement, le collectif Toutes nos Énergies-Occitanie-Environnement, le collectif national Énergie-Vérité et l’association VMF