Mérule, l’ennemi à abattre

Par Philippe Jary Juriste chargé du conseil aux adhérents

Date de publication : 24/01/2022

Temps de lecture : 7 minute(s)

Le service de conseils aux adhérents propose des conseils pratiques au sujet de problématiques auxquelles les propriétaires doivent couramment se confronter. Cette semaine, un point sur comment combattre les mérules.

Qu’est-ce que la mérule ?

Comme il est de saison d’aller « aux champignons », la mérule en est un qui ne finira pas dans votre assiette, mais qui risque de s’attaquer à votre maison en causant des dommages irrémédiables !

Parmi les différentes espèces de champignons qui peuvent se trouver dans une habitation, comme les moisissures, la mérule est quelque peu différente car il lui suffit de peu d’humidité pour se développer rapidement. La mérule, champignon lignivore, se nourrit de cellulose et de lignite. Elle prolifère donc sur toutes les matières qui en contiennent, principalement le bois, mais aussi le papier et le carton.

Dans un espace clos, humide et peu ventilé, particulièrement dans un bâti ancien comportant une structure en bois et des boiseries, la prolifération de la mérule peut avoir lieu sans que l’on s’en aperçoive immédiatement et, lorsque les dégâts causés deviennent apparents, il est souvent trop tard !

Quels sont les signes de présence de mérules ?

La mérule peut se développer insidieusement et de façon discrète dans votre maison, stagner un certain temps, puis se développer dès que les conditions lui sont favorables (au minimum 20 % d’humidité dans un espace peu ventilé).

Ainsi, sur une plinthe, au bas d’un mur extérieur humide, vous constaterez que le bois est altéré, a disparu sous la peinture et tombe en poussière, que le plancher est anormalement déformé, que des panneaux de boiseries sont déformés, gonflés ou s’effritent… les dommages, apparents ou non, sont multiples et peuvent conduire à l’effondrement. La mérule produit une pourriture brune, décomposant le bois en fentes parallèles et transversales aux fibres du bois qui est réduit en particules cubiques. Il peut y avoir aussi des traces cotonneuses épaisses et blanchâtres de mycélium ou la présence sur les murs de filaments gris argentés formant un motif en « toile d’araignée ».

Ce champignon présente des risques importants pour les constructions, mais aussi pour la santé des occupants les plus fragiles car il peut causer des allergies, de l’asthme et d’autres troubles respiratoires.

Que faire lorsque la présence de mérules est confirmée ?

Dès que vous constatez des signes qui peuvent indiquer la présence de mérules, il vous faut contacter immédiatement une entreprise spécialisée qui pourra confirmer ou infirmer le diagnostic, d’autres champignons comme les moisissures pouvant entrainer une confusion. En effet, seules des entreprises spécialisées et certifiées peuvent vous garantir un traitement efficace car les mérules peuvent pénétrer dans des murs de maçonnerie de 80 centimètres d’épaisseur et se propager dans l’air par leurs spores.

Quels sont les traitements pour éradiquer les mérules ?

Différentes techniques sont mises en œuvre par les entreprises agréées :

  • si l’infestation n’est pas trop importante, le traitement consistera à injecter des produits fongicides sur les bois et les maçonneries atteintes ;
  • lorsque l’étendue de l’infestation est importante, tous les bois, doublages, parquets, poutres et lambris atteints devront être démontés, ce qui peut conduire les habitants à déménager pour permettre les travaux. Le traitement consistera alors à bruler les maçonneries au chalumeau, puis à injecter un produit fongicide à l’intérieur des murs après perçage de trous pour l’injection.

Plus récemment, un traitement moins destructif et moins couteux a été testé avec succès, consistant à diffuser de l’air chaud dans la maison rendue hermétique à une température de 50° C pendant 16 heures, seules les pièces de bois trop détériorées devant être remplacées.

Quelles sont les aides financières ?

Les assurances ne prennent en charge financièrement ces travaux que lorsque les mérules sont la conséquence d’un dégât des eaux. Il n’est pas prévu dans leurs contrats de prise en charge spécifique de ces champignons. La question a été posée à l’Assemblée, mais le gouvernement n’a pas jugé utile de mettre en place des prises en charge réglementaires de ces désordres.

Lorsque vous êtes confrontés à une attaque de mérules, il peut être prévu à l’échelon local une participation municipale ou des subventions de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) pour la lutte contre l’habitat insalubre. Il peut donc s’avérer utile de se renseigner auprès de sa mairie et de la préfecture.

Lorsque votre propriété a le label de la Fondation du patrimoine ou est protégée au titre des Monuments historiques, les travaux d’éradication des mérules étant des actions destinées à l’entretien et à la préservation du patrimoine, on peut dès lors penser qu’il est possible de les déduire fiscalement, en application de règles applicables en la matière.

Quelles sont les obligations légales et réglementaires ?

La loi Alur a instauré une réglementation pour éradiquer les mérules par la connaissance de son développement. Ainsi, le propriétaire ou le locataire d’un immeuble contaminé par les mérules a l’obligation d’en faire la déclaration auprès de la mairie et des services municipaux (art. L. 33-7 du code de la construction et de l’habitation (CCH)). Ces déclarations permettent d’établir une cartographie des zones à risque de mérules, le préfet pouvant prendre un arrêté préfectoral lorsque plusieurs communes sont impactées par la progression des infestations de mérules (art. L.133-8 du CCH).

Lorsqu’il existe un arrêté préfectoral concernant l’infestation de mérules, les éléments provenant de démolitions totales ou partielles sont soumis à des précautions spécifiques : obligation de destruction par incinération, sur place si possible, et, avant tout transport, une déclaration en mairie est obligatoire.

Lors de la vente d’un bien situé dans la zone couverte par l’arrêté préfectoral, la présence d’un risque de mérules doit être portée à la connaissance des acquéreurs (art. L.133-9 du CCH) et le dossier de diagnostics techniques doit être complété (art. L.271-4 al. 9 du CCH).

Cette chronique étant volontairement synthétique et ne pouvant de ce fait être exhaustive, nous vous invitons à consulter le dossier très complet édité par l’Anah.

Cette rubrique est offerte par le service de conseils aux adhérents des VMF. Pour plus d’informations ou pour des conseils personnalisés, prenez contact avec nos experts : juridique@vmfpatrimoine.org.

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