La protection de l’image de votre propriété

Par Philippe Jary Juriste chargé du conseil aux adhérents

Date de publication : 18/02/2022

Temps de lecture : 4 minute(s)

Le service de conseils aux adhérents des VMF propose des conseils pratiques au sujet de problématiques auxquelles les propriétaires doivent couramment se confronter. Cette semaine, un point sur le droit à l’image d’un bien privé.

De quoi s’agit-il ? 

Vous êtes le propriétaire d’une belle demeure, d’un manoir, d’un moulin, d’un château ou d’un magnifique jardin… visible du domaine public et des passants le prennent en photo. 

Il se peut également que vous vous aperceviez que votre propriété se trouve en arrière-plan de publicités touristiques ou autres, sans que l’on ne vous ait sollicité pour obtenir votre accord ! 

Très naturellement vous pensez que votre propriété dispose d’un droit à l’image comme vous et qu’il n’est pas possible d’en prendre photo sans votre accord préalable… mais, est-ce bien le cas ? 

Quelle sont les règles applicables ? 

À la différence du droit à l’image des personnes qui est strictement réglementé par l’article 9 du Code civil aux termes duquel toute personne peut s’opposer à la capture et à la diffusion de son image sans avoir donné son accord préalable, les propriétés bâties et paysagères ne disposent pas du même principe de protection. 

Pour les propriétés immobilières, il convient de se référer à l’article 544 du Code civil qui confère au propriétaire un droit quasi absolu sur son bien qui lui permet de l’exploiter comme il l’entend. 

Il a été ainsi considéré que le fait de prendre le bien immobilier en photographie ne porte pas atteinte à la jouissance du bien par son propriétaire. 

Lors de différentes procédures engagées par des propriétaires, les juges ont considéré que le propriétaire était en droit de s’opposer à l’exploitation de l’image de son bien que lorsque cela lui procurait un « trouble anormal ». 

La notion de trouble anormal est délicate à définir et doit s’apprécier in concreto en fonction de chaque cas d’espèce. 

Quelques exemples : 

À l’examen de la jurisprudence, nous pouvons constater que le droit à l’image d’une propriété a été atteint lorsque l’utilisation de la photo de la propriété pouvait entraîner une confusion ou lui porter atteinte en termes de notoriété. 

Ce fut le cas pour des grands crus où la représentation sur l’étiquette des bouteilles était celle d’un château réputé, alors que le vin était celui du domaine mitoyen de qualité inférieure ! 

La Cour de cassation a également jugé le 10 mars 1999 que la diffusion de cartes postales représentant un café situé sur une plage du débarquement de Normandie, présenté comme la première maison libérée en 1944, aurait dû être préalablement autorisée par son propriétaire, au titre du droit à l’image.

Dans un cas pratique qui nous a été soumis, un promoteur avait dénommé un lotissement de pavillons, qu’il allait construire et dont il faisait la publicité, du nom du château et de son jardin remarquable situé à proximité. La silhouette du château figurait en arrière-plan sur les publicités ce qui pouvait laisser croire aux acquéreurs potentiels que ce lotissement était construit sur le terrain du domaine. 

Une négociation engagée avec le promoteur, fondée sur le préjudice d’image et la confusion que cela pouvait engendrer, a permis de faire modifier les publicités pour ce lotissement. 

Une procédure judiciaire a pu être évitée, mais le propriétaire du domaine aurait obtenu gain de cause et, le cas échéant, des dommages intérêts pour le préjudice subi.

Cette rubrique est offerte par le service de conseils aux adhérents des VMF. Pour plus d’informations ou pour des conseils personnalisés, prenez contact avec nos experts : juridique@vmfpatrimoine.org.

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