En novembre 2022, à Delphes (Grèce), à l’occasion des 50 ans de la convention du Patrimoine mondial de l’Unesco, plusieurs dizaines de spécialistes du monde entier se sont réunis aux côtés des représentants de l’organisation et des états membres pour évoquer « Le patrimoine mondial comme source de résilience, d’humanité et d’innovation », en particulier l’économie du tourisme.
Créée en 1972 par 194 états signataires, la convention du Patrimoine mondial valorise des sites exceptionnels. À ce jour, 1154 sites culturels et naturels sont inscrits. Plus que protéger des édifices et sites anciens, elle alerte les pays sur les préoccupations de conservation et de valorisation patrimoniales et culturelles.
En 2022, 897 sites culturels ont été impactés par les changements environnementaux (températures, montée des eaux, etc.), certains étant même en voie de disparition. 52 sites sont en « périls », tels que Venise, « en raison de son tourisme de masse », souligne Perter Debrine, expert du tourisme soutenable pour l’Unesco. Pour reprendre les mots de Lazare Eloudou Assimo, directeur du Patrimoine mondial, l’Unesco est « un observateur du changement climatique ». Pour son 50e anniversaire, compte tenu de la dégradation de notre environnement, en particulier des conséquences du dérèglement du climat, l’Unesco s’est focalisé sur trois enjeux : la représentativité, l’accessibilité et la durabilité du patrimoine mondial.
Le sauvetage d’Abou Simbel, en Égypte, grâce à une campagne internationale lancée par l’Unesco en 1960, a engendré en 1972 la création de la convention internationale pour la protection du Patrimoine mondial. © Christian Sarbach Palais vénitiens le long du Grand Canal (Italie). En 2021, Venise échappe de justesse à l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial en péril. © Bernard G
La question du tourisme est au centre des discussions. En effet, bien qu’il soit source de nombreux bienfaits pour le patrimoine (entretien, restauration, etc.), il favorise aussi sa dégradation. PAJ avait d’ailleurs eu un échange à ce sujet avec Philippe Calot en mai dernier. Six spécialistes et leur public ont donc échangé une journée autour de la thématique « Le tourisme durable pour les 50 prochaines années : défis et pistes d’avenir ».
Portée par des valeurs de protection du patrimoine et des cultures, l’organisation mondiale s’adresse aux entreprises et aux Etats. Si elle n’a pas la possibilité de sanctionner la non-protection des sites, elle peut alerter sur les conséquences de l’irresponsabilité de pratiques devenues nuisibles pour le patrimoine et les communautés locales, et aider à favoriser des modèles plus responsables. À travers la création de World Heritage Journeys Europe, l’Unesco propose par exemple de visiter des sites avec une approche culturelle sensibilisant aux problématiques du lieu. En France, le château de Versailles et le Mont Saint-Michel bénéficient de ce travail.
L’organisation met aussi en avant, de manière plus générale, la puissance des politiques culturelles portées par les états, indissociables des entreprises touristiques, une perspective qu’elle a développé lors d’une conférence intitulée « Les politiques culturelles et le développement durable ».
Tous s’accordent sur la nécessité de changer notre regard sur un tourisme qui peut et doit devenir durable. Si la simple volonté ne suffit pas, elle est un préalable indispensable pour initier un changement profond. Cent cinquante états ont d’ailleurs adopté une déclaration dans ce sens et initient de nouveaux projets.