Le Théâtre de la Ville de Paris : à l’aube d’une nouvelle histoire architecturale

Par Julie Mahé Assistante de rédaction
Temps de lecture : 4 minute(s)

Situé au 2, place du Châtelet, dans le 4e arrondissement, le Théâtre de la Ville rouvrira prochainement ses portes après sept années de fermeture pour travaux. La date exacte n’est pas encore connue. À quelques mois de découvrir les réalisations menées par les architectes du cabinet Blond & Roux, ce projet, première rénovation d’ampleur depuis 1966 pour le bâtiment, ouvre un nouveau chapitre de son histoire architecturale.

Le théâtre est construit entre 1860 et 1862 en face du théâtre du Châtelet sur la base d’un plan commun aux deux édifices. Détruit lors de la Commune de Paris, il est redessiné par l’architecte Gabriel Davioud à la demande du Baron Haussman (1809-1891), préfet de la Seine, qui initie la reconstruction de Paris pour qu’elle devienne la « capitale des capitales »[1]. Aujourd’hui encore, la façade conserve son style Napoléon III, avec ses cadres en fer et lucarnes en verre qui existaient initialement. Inscrit au titres des Monuments historiques en 1990, l’ensemble de l’édifice est qualifié d’« intelligemment conçu » par les historiens réputés Robin Middleton et Davdi Watkin[2].

À partir de 1966, le théâtre, jusque là nommé Sarah-Bernhardt, est rebaptisé « Théâtre de Paris ». En 1967, Jean Mercure, directeur et metteur en scène des lieux de 1967 à 1985, fait appel à deux architectes, Valentin Fabre et Jean Perrottet, pour rénover l’intérieur afin d’accueillir plus de public et augmenter la rentabilité du théâtre. Les deux architectes transforment la salle centrale à l’italienne. Elle devient un amphithéâtre de 1000 places réparties sur des gradins en béton et pour accueillir plus de spectateurs, tout en améliorant la visibilité et la qualité sonore. Les besoins de l’époque, à la fois fonctionnels, sociaux et esthétiques, ont radicalement modifié l’intérieur[3], notamment par l’enlèvement des décorations et un regard des spectateurs davantage focalisé sur la scène. Le théâtre est désormais moins perçu comme un lieu de sociabilité caractéristique des théâtres autrefois, où le public était à la fois tourné vers la scène et vers la « représentation/présence des spectateurs »[4].  La scène devient aussi mobile, grâce à des vérins indépendants et contrôlables à distance. Ces améliorations techniques permettent à Jean Mercure et à son successeur Gérard Violette de faire de ce théâtre un lieu incontournable de la danse contemporaine.

Outre la création d’une annexe du théâtre avec une seconde salle de 400 places au Théâtre des Abbesses, aucune transformation d’envergure n’avait été réalisée depuis les années 1960 au Théâtre de Ville.

Le cabinet d’architecture Blond & Roux, en charge des travaux depuis 2015, s’est attaché à mettre aux normes de sécurité le bâtiment, à reconfigurer une partie de l’espace à l’étage, et à débarrasser l’édifice du plomb et de l’amiante. Le site ayant toujours permis à des architectes talentueux de réaliser des projets uniques, nous avons hâte de découvrir ce que le XXIe lui offrira !


[1] Robin Middleton, David Watkin, Architecture du XIXe siècle, Paris, Gallimard/Electa, 1993, p. 234.

[2] Robin Middleton est un historien, professeur à Cambridge qui enseigne l’architecture en France du XVIIIe siècle.  David Watkin est un historien, professeur émérite à l’université de Peterhouse, et l’université de Cambridge. Ces recherches se sont principalement concentrées sur l’architecture néoclassique du XVIIIe siècle.

[3] Catherine Guillot, « L’architecte de théâtre », Double Jeu, n ° 2, 2004, p. 34.

[4] Christian Biet, « La perspective impossible des salles de théâtre sous l’Ancien Régime », Ville et architecture en perspective, Nanterre, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2018, p. 190.

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