Le numéro 295 du magazine VMF, sorti en kiosque le 6 janvier 2021, vous emmène dans le Gers. Vous souhaitez en découvrir davantage ? PAJ a sélectionné quelques ouvrages au carrefour du patrimoine et de l’art de vivre pour explorer en profondeur cette région rurale aux étendues verdoyantes.
Une ode aux pigeonniers
Petit édifice typique de la vie rurale, le pigeonnier constitue souvent un patrimoine négligé, délaissé et abîmé par le temps. Michel Lucien, auteur de plusieurs ouvrages consacrés à ces étonnants édifices (Pigeonniers en Midi-Pyrénées et Pigeonniers du Tarn), se bat pour faire vivre ce patrimoine. En 2018, il publie Pigeonniers et hunes du Gers, un ouvrage remarquable et tout aussi complet que ceux qui l’ont précédé, dans lequel il parcourt le département à la recherche de ces trésors oubliés des livres d’histoire.
Sous l’Ancien Régime, la possession d’un pigeonnier était un droit commun, au même titre que celle d’un four à pain, et sa taille était représentative des moyens de son propriétaire. Les oiseaux occasionnant trop de dégâts aux cultures, un grand nombre d’entre eux a été volontairement détruit lors du siècle dernier. Conçu comme un véritable circuit, le livre Pigeonniers et hunes du Gers invite le lecteur à découvrir ceux qui sont parvenus jusqu’à nous, proposant une promenade inédite et bucolique dans le Gers. On y découvre de nombreux édifices dont la pluralité était alors insoupçonnée. Entre les pigeonniers isolés, les pigeonniers à tours carrées, les pigeonniers hexagonaux ou encore les hunes aux toits circulaires, tout un pan méconnu de l’architecture du Gers se dévoile au lecteur. La fonction de ces monuments, inscrits à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques, a évolué avec le temps : beaucoup se sont transformés en dépendance ou en logement insolite pour accueillir les touristes en quête d’évasion.
Bien pensé, le livre dispose d’un historique des pigeonniers ainsi que d’un glossaire complet permettant de comprendre les nombreux termes architecturaux propres à ces petits édifices, comme la grille d’envol (ouverture circulaire destinée aux pigeons) ou l’échelle tournante (qui permet au propriétaire d’accéder aux hauteurs du pigeonnier). Au fil des pages et des photographies, que Michel Lucien a lui-même prises, le lecteur touche à l’essence de ce petit patrimoine qui continue de faire la joie des passionnés, la surprise des promeneurs et l’originalité de nos campagnes.
Pigeonniers et hunes du Gers, par Michel Lucien, Éditions Empreinte, 200 pages, 27,90 €
Vivre en Armagnac : luxe, calme et volupté
« Ici, chez moi, vous êtes chez vous… » Le château de Malliac, entre Condom et Montréal-du-Gers, a fait sienne cette devise qui pourrait résumer à elle seule l’ouvrage de Geneviève Jamin et Daniel Rey. Respectivement spécialisés dans l’architecture et l’histoire de l’art pour l’un, le vin et les spiritueux pour l’autre, le couple d’auteurs nous ouvre les portes des châteaux et belles demeures viticoles du Gers, levant le voile sur la fabrication de l’armagnac, les traditions qui l’entourent et ses hauts lieux de production.
L’immersion est totale et l’effet réussi : une chaleur sans pareil se dégage de ces larges pages aux belles photographies d’ambiance (l’œuvre de Flavio Pagani), tandis que nous suivons les auteurs d’un domaine à l’autre. On jurerait entendre le feu crépiter dans l’immense cheminée Renaissance du château de Maniban. Des caves aux grands salons, le parfum ambré de l’armagnac semble flotter dans l’air. Tendez l’oreille… Au château de Lacquy, vous distinguerez le tintement des verres qui s’entrechoquent au-dessus des grandes tablées, où les mets de la région sont à l’honneur : volaille fermière, pastis, boudin noir… Après le repas, et jusque tard dans la soirée, vous percevrez dans les étages les rires des différentes générations qui s’entremêlent, pour toujours mieux se retrouver au sein de ces grandes demeures souvent familiales.
Bien plus qu’un ouvrage sur la célèbre eau-de-vie gasconne, Vivre en Armagnac est une véritable ode au bel art de vivre gersois. Il nous conte la région à travers son patrimoine culinaire, viticole et domestique, nous entraînant là où les jours s’écoulent paisiblement au rythme des saisons. « Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté… » C’est peut-être en ces terres gersoises que les vers de Baudelaire résonnent le mieux.
Vivre en Armagnac, Les intérieurs des plus belles demeures viticoles, par Geneviève Jamin et Daniel Rey, photographies de Flavio Pagani, Éditions d’Autils, 224 pages, 55 €
Le patrimoine gersois mis à l’honneur
Jacques Lapart parle des châteaux du Gers avec passion et rigueur, évoquant religieusement l’histoire et la singularité de chacun. L’historien, président de la Société archéologique du Gers, a parcouru le département avec son confrère photographe David Bourdeau pour recenser châteaux et grandes demeures. Le riche ouvrage, constitué de plusieurs tomes, est une aubaine pour cette région rurale, dont le patrimoine n’a été que rarement mis à l’honneur !
Magnifiés par les photos aériennes de David Bourdeau, les élégants domaines révèlent leurs secrets au fil des pages. Le château de Monbardon, construit au XVIe siècle, fut le refuge des Anglais lors des guerres napoléoniennes, et la vie y semblait si douce qu’un soldat ne voulait plus le quitter. « J’aime beaucoup cette manière de faire campagne, écrit-il. Nous avons eu une excellent dîner et quantité de vin de Bordeaux. J’espère que la guerre durera encore un an dans ce pays ! » Alors qu’il est aujourd’hui en ruines, ces lignes ravivent la mémoire hospitalière du château. Quelques fantômes également, comme le château disparu de Préneron, une petite seigneurie du XVIe siècle que les flammes ont ravagé en 1918, ne laissant derrière elles qu’une dépendance transformée en maison bourgeoise. Bien mieux conservé et restauré avec goût, le château de Séailles, en Bas-Armagnac : si sa datation exacte est inconnue, il appartient à la même famille depuis le XVIIIe siècle. C’est toute l’identité du territoire qui se dévoile à travers les histoires de ces grandes demeures.
Les quelques 300 pages que constituent les deux premiers tomes ne suffisent pas à honorer l’ensemble du patrimoine de la Gascogne gersoise : la publication d’un troisième tome est prévu pour l’année 2021 !
Châteaux et belles demeures du Gers, par David Bourdeau et Jacques Lapart, Éditions du Val d’Adour, 143 pages, 26 €
Le Gers au quotidien
Le patrimoine ne compte pas seulement des grandes demeures et des vieilles pierres ! C’est également un héritage culturel, gastronomique et historique. Au fil de leurs pages, ces quelques ouvrages vous invitent à découvrir l’art de vivre gersois.
Le Nez de l’armagnac
C’est un véritable apprentissage que propose ici Jean Lenoir, auteur et œnologue passionné. Cet ouvrage, qui s’adresse aux amateurs de bons alcools et à ceux souhaitant s’y initier, traite des différentes étapes de la fabrication de l’armagnac et s’accompagne de 12 flacons renfermant divers arômes caractéristiques de la célèbre eau-de-vie gasconne. Pour une lecture pleine de saveurs.
Le Nez de l’armagnac, par Jean Lenoir, Éditions Jean Lenoir, 75 €
Les meilleures recettes du Gers
La collection des cuisinières, aux éditions Stéphane Bachès, présente un impressionnant ensemble d’ouvrages de cuisine régionale. La Cuisinière gersoise propose une multitude de recettes traditionnelles du Gers : de la gelée de coings à la croustade, en passant par le foie gras – d’oie comme de canard – et la tourtière. Il fait partie de ces ouvrages culinaires qui enchantent les grandes tablées et se transmettent de génération en génération.
Cuisinière gersoise, Les meilleures recettes, par Régine Lorfeuvre-Audabram, Éditions Stéphane Bachès, 60 pages, 10,50 €
L’histoire d’une terre et de son peuple
C’est un conflit peu connu qu’aborde l’historien médiéviste Bertrand Schnerb. Souvent occulté par d’autres évènements majeurs de la guerre de Cent Ans, la guerre civile qui s’est jouée entre Armagnacs et Bourguignons au début du XVe siècle a pourtant été cruciale dans l’histoire du royaume de France. Ces grandes familles, toutes deux héritières de la branche des Valois, se sont déchirées autour du trône de Charles VI, dont il fallait alors assurer la régence. La situation s’exacerbe d’autant plus qu’en 1415, les Bourguignons se rangent derrière les Anglais… Un précis d’histoire essentiel qui permet de comprendre la polémologie du Moyen Âge et de (re)découvrir les origines gasconnes de la maison d’Armagnac.
Armagnacs et Bourguignons, La maudite guerre, 1407-1435, par Bertrand Schnerb, Éditions Perrin, 409 pages, 10 €
Pour découvrir l’intégralité de notre dossier Gers, procurez-vous le magazine VMF n° 295 de janvier 2021 ici.