À Joinville, voyage dans l’art de la faïence et de la porcelaine de l’est de la France

Par Anaïs Thijssens Journaliste

Date de publication : 28/06/2023

Temps de lecture : 4 minute(s)

Cet été, les maîtres du Couvent des Annonciades célestes, à Joinville (Haute-Marne), présentent une exposition consacrée aux faïences et aux porcelaines de Haute-Marne et de l’est de la France. Dans ce lieu inscrit à l’inventaire supplémentaires des Monuments historiques depuis 1994, sont exposées jusqu’au 17 septembre les collections de trois manufactures haut-marnaises (Aprey, Giey-sur-Aujon et Langres), aux côtés des productions de Lunéville et de Saint-Clément.

Après une première exposition en 2022 organisée en partenariat avec l’évêché de Langres et intitulée Quatre siècles d’histoire au féminin : les annonciades célestes à Joinville, Noomane Fakhar et Anthony Koenig, directeur de projet Cœur de Ville en Haute-Marne, ont inauguré le 15 avril 2023, au Couvent des Annonciades célestes, une exposition consacrée à la faïence et la porcelaine de l’est de la France, du XVIIIe au XXe siècle. Ce lieu, acquis par eux 2019 (article paru sur PAJ le 14 avril 2020), est un ancien monastère de la Pitié qui, de 1840 à 1975, a abrité une congrégation d’annonciades célestes.

« L’idée de cette exposition est de montrer la place des manufactures de faïence du Grand-Est et comment celles-ci ont influencé les autres régions », explique Anthony Koenig. Environ 180 objets sont exposés dans quatre pièces, répartis par manufactures : Lunéville et Saint-Clément, Aprey, Langres et Giey-sur-Aujon.

La faïencerie de Lunéville, indissociable de la manufacture de Saint-Clément, a été l’une des plus importantes manufactures du Grand-Est, considérée comme la plus ancienne faïencerie française. Elle est fondée en 1730 par Jacques Chambrette, fils du maître faïencier du même nom. En 1731, la manufacture bénéficie d’un privilège royal, des lettres patentes du Duc François III et de la Duchesse Elisabeth-Charlotte d’Orléans, qui leur accordent l’exonération d’impôts et de charges. Sur requête de Jacques Chambrette, le roi Louis XV donne l’autorisation de fonder une nouvelle manufacture de faïence à Saint-Clément, sur les terres des Trois-Évêchés, pour faire face aux lourdes taxes d’exportation vers la France. Ces coûts affectent au plus haut point l’économie de la faïencerie à Lunéville, qui se retrouve contrainte de vendre sa manufacture à Sébastien Keller en 1786. Son association avec Guerin — Keller & Guérin — permettra la réunification de la manufacture de Lunéville et de Saint-Clément, en 1892.

En 1922, Lunéville et Saint-Clément sont rachetées par la société de faïencerie Fenal, qui relance la production, employant dix mille ouvriers. Mais en 1968, un terrible incendie ravage la manufacture. Bien que l’entreprise maintienne son activité, le marché de la faïence, dédié majoritairement aux listes de mariage, s’effondre progressivement, entraînant la fermeture de Lunéville. Quant à Saint-Clément, elle a également connu un départ d’incendie, celui-ci ne causant pas de dégâts majeurs. Le marché ne lui étant malheureusement pas plus favorable , une demande de fermeture administrative est déposée en 2022, suivie par sa liquidation.

À l’instar de Lunéville et Saint-Clément, les manufactures d’Aprey, Langres et Giey-sur-Aujon ont disparu elles-aussi. L’exposition du Couvent des Annonciades célestes permet de découvrir l’histoire et le patrimoine de ces faïenceries de l’est de la France. « Nous avons essayé de ne pas prendre toujours les mêmes objets, pour avoir une diversité et une représentativité des productions, comme par exemple une dînette », nous précise Anthony Koenig. Parmi les objets exposés, on trouvera donc de la vaisselle de table, des vases, mais aussi des statues zoomorphes, des statuettes religieuses, des pendules…

On peut également admirer une table parée dans l’esprit du XVIIIe siècle, sur le thème des chinoiseries, tendance en vogue au Siècle des Lumières, ou encore des pièces plus rares, comme le char et les dragons japonisant du célèbre Émile Gallé, ou des objets signés de Paul-Louis Cyfflé.

Toutes ces pièces ont été prêtées par des collectionneurs qui exposent eux-mêmes leur collection dans d’autres villes. Le hasard a fait que l’une des voisines d’Anthony Koenig, propriétaire d’un ancien hôtel de voyageurs fermé en 1895, avait conservé de la vaisselle de l’hôtel en provenance de la manufacture d’Aprey. Celle-ci est actuellement exposée au Couvent des Annonciades célestes.

Couvent des Annonciades célestes – du 15 avril au 17 septembre 2023

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