État des lieux des niches votives, proposition d’une action groupée sur huit éléments importants, par l’association Renaissance du Lille ancien et assistance financière de sa Fondation RLA, sous l’égide de la Fondation de Lille.
PRÉAMBULE : LE CONTEXTE
Les niches votives à statues et les groupes sculptés étaient particulièrement foisonnants à Lille, ville catholique. On trouvait aussi de multiples enseignes sculptées dans le grès ou la pierre blanche. La démolition du quartier Saint-Sauveur en 1960 a anéanti la part la plus importante de ce petit patrimoine de la rue. Le Vieux-Lille conserve encore quelques beaux exemples malheureusement très dégradés ou très menacés pour ceux en pierre blanche gélive. L’indifférence et le manque d’entretien font que ce patrimoine fragile est en situation de péril imminent.
Depuis 1964, l’association pour la Renaissance du Lille Ancien, RLA, œuvre pour la défense, la préservation et la mise en valeur du patrimoine lillois. Soucieuse d’être plus efficace, elle s’est dotée en 2015 d’un outil opérationnel, la Fondation Renaissance du Lille Ancien, Fondation RLA, sous l’égide de la Fondation de Lille, dont l’objet social est d’aider financièrement à la restauration correcte du petit patrimoine. L’objectif à terme est de créer une sorte de fonds social pour le patrimoine dit Fonds Solidarité Patrimoine afin d’aider particulièrement les petits propriétaires. Dans l’immédiat, il a été choisi de mener une action plus spectaculaire et symbolique sur des éléments visibles afin « d’amorcer la pompe » pour collecter les premiers fonds.
En 2015, notre association a confié à une stagiaire de l’École du Louvre, Jeanne Vermeersch, le récolement de la documentation et le recensement des niches. Nous disposons ainsi déjà d’un outil intéressant et facile à utiliser.
Nous avons réalisé une exposition de sensibilisation et édité trois itinéraires.
Sur cette base et avec notre connaissance du terrain, nous avons recensé huit opérations prioritaires, soit par l’urgence de la situation et leur importance patrimoniale, soit par leur emplacement et leur caractère symbolique et spectaculaire, soit par la plus grande facilité de leur restauration ou la réceptivité des propriétaires.
L’étude que nous menons montre une sensibilité de certains propriétaires mais l’indifférence d’autres. Dès les fonds nécessaires recueillis, nous engagerons les opérations le plus rapidement possible en fonction de ces critères.
En 2018 et 2019, la Fondation RLA a piloté une opération dite Niches et œuvres d’enfants pour faire réaliser dans les écoles, avec des artistes, des œuvres contemporaines éphémères pour meubler les niches vacantes. Cette opération de sensibilisation des plus jeunes a rencontré un bon accueil.
Vous trouverez dans ce dossier une fiche par opération envisagée pour découvrir l’état alarmant de ce petit patrimoine. Une visite sur place, avec Simon Ducros, conservateur régional des Monuments historiques, Catherine Bourlet, architecte en chef des Bâtiments de France et chef de l’Udap et Véronique Stievenart, architecte en chef des Bâtiments de France, a permis de choisir les partis de restauration à engager.
On peut s’attendre à un impact positif très fort dans le public avec des retombées médiatiques importantes.
LES ACTIONS PRIORITAIRES
En suivant l’évolution des différentes niches et groupes sculptés, et par un patient travail de terrain nous avons défini huit opérations prioritaires.
Plus faciles
• 39, avenue du Peuple-Belge, saint Joseph à l’enfant Jésus. Les propriétaires sont demandeurs.
• 2 rue Négrier, la tour Saint-Pierre. La propriétaire est demandeuse.
• 6, rue Saint-Joseph, dans un état moins alarmant mais propriétaire à convaincre.
Relativement facile
• Rue de la Collégiale. Empreinte très lisible d’une très grande niche. Restitution aisée des manques, des moulures et larmiers. Étude réalisée par François Bisman, architecte du patrimoine. Nouveaux propriétaires à contacter. Il a été jugé opportun de passer du fantôme au volume.
En péril, exceptionnelles et compliquées
• 8 rue d’Angleterre, niche dite Saint-Pierre de Canterbery, pierre blanche calcinée, dégradation rapide. Propriété de l’ordre des Avocats, jusqu’à présent indifférent, contacté à nouveau. Une maîtrise d’ouvrage déléguée leur a été proposée. Rue Au Péterinck, très beau groupe dit Au puits doré, inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques. En état de dégradation avancée avec aggravation rapide à chaque hiver. Situation bloquée depuis plusieurs années.
Demande réflexion mais hautement symbolique et visible
• Rue Lepelletier, ancien passage des Prêtres. Grand groupe sculpté en très mauvais état sur immeuble Monument historique. Une étude a déjà été faite par François Bisman, architecte du patrimoine. Le permis de construire de 1677 précise qu’il s’agit d’une dédicace à Notre-Dame de Délivrance. Avec le service des Monuments historiques, il a été jugé judicieux d’aller plus loin dans la voie d’une restauration-restitution. Études, recherches et négociations à mener.
En panne
• Rue de la Monnaie, Notre-Dame de la Treille, statue en bois sur un piédestal et sous un baldaquin. Opération lancée en 2015, bien partie, subvention accordée par la Drac, mais stoppée pour cause de divergences de discours à l’époque de la part de la Drac. Nous allons relancer le projet.
La tour Saint-Pierre
2 rue Négrier
Notice de Jeanne Vermeersch RLA 2015
Tour Saint-Pierre
Elle se trouve sur la droite de la façade. Dans une ancienne fenêtre bouchée du premier étage.
Niche en pierre vide.
Représentation de l’ancienne tour de la porte Saint-Pierre.
Tour se tenant sur un socle avec des incisions imitant des briques. La tour est ouverte au centre par un grand arc, sur les côtés on remarque 4 trous dans la pierre où il devait y avoir une ferronnerie.
Le toit est en cône avec une corniche portant des dentelures.
En dessous, un grand rectangle de pierre portant l’inscription : « Soyez, Vierge et Mère de Dieu. La sauvegarde de ce lieu. »
État moyen. Manquent la ferronnerie et la statue.
Contexte : La propriétaire est prête à coopérer mais la niche fait partie d’une copropriété où elle est cependant majoritaire. Pas de protection MH. Un devis et une proposition de restauration sont en cours. L’état de la pierre est problématique.
Saint Joseph à l’enfant Jésus
39 avenue du Peuple-Belge
Notice de Jeanne Vermeersch RLA 2015
1662 (inscription sur l’arc au-dessus de la porte).
Situation au-dessus de l’arc en plein cintre au-dessus du millésime.
Groupe sculpté en pierre.
Saint Joseph tenant Jésus enfant par la main.
Joseph est représenté barbu et chevelu avec une longue tunique et une cape retenues sur l’épaule gauche. Il a le visage fermé avec le regard dirigé au loin.
L’enfant Jésus regarde son père. Il est vêtu d’une tunique ceinturée au niveau des hanches et d’une cape retenue au niveau du cou. Il est représenté chevelu.
Un pied de lys sort de la terre entre lui et Jésus (tradition recommandée par Thérèse d’Avila).
Les deux personnages sont sculptés en pierre et se tiennent sur un léger socle de taille inégale.
La sculpture est polychrome : noire pour les cheveux, rouge pour la cape et gris pour les tuniques ainsi que le lys.
État moyen.
Encrassement.
Perte de matière au niveau des mains et de la tête du petit Jésus et à certains endroits des vêtements.
Contexte
Non protégé MH. Une protection est souhaitable. Restauré dans les années 1980-1990 par François Oliver à qui on doit la couleur. Dégradation rapide. Les propriétaires sont demandeurs d’une restauration. Il faut agir vite. On ne restituera pas les parties manquantes.
Saint Thomas de Canterbury
8 rue d’Angleterre
© Renaissance du Lille Ancien
Notice de Jeanne Vermeersch RLA 2017
Saint Thomas Beckett.
Entre deux fenêtres, sur la façade du rez-de-chaussée.
Niche en pierre.
Socle en pierre à trois niveaux avec le niveau supérieur en avant de la niche.
La niche est mise en valeur par des guirlandes de fruits et de fleurs de chaque côté. Au-dessus de l’arc en plein cintre devait se trouver des volutes symétriques partant vers l’extérieur dont le commencement au centre est encore visible.
Elle est surmontée par une corbeille de fruits typiquement lilloise.
Le cul de four de la niche est orné d’une coquille dont les différentes courbes sont encore visibles.
En-dessous on peut voir dans une médaillon central ovale en relief une inscription « Sancto Thomas Canturbiensi hujus aedis quondam hospiti sit laus honor et gloria » soit « Louange, honneur et gloire à Saint Thomas de Canterbury jadis hôte de cette maison. ».
Le médaillon est entouré d’une rangée de perles ainsi que de volutes.
La niche est vide.
En danger sanitaire.
Perte de matière,
Craquelures,
Contexte
Non protégée MH. Provenance supposée d’une maison de chanoines de la collégiale Saint-Pierre réinstallée sur une façade XVIIIe après la destruction de la collégiale en 1793 et remodelage du quartier. Propriété de l’ordre des Avocats qui fait la sourde oreille depuis 2015 malgré nos relances et n’est pas du tout motivé par le sauvetage de cette œuvre remarquable du petit patrimoine lillois, dont la dégradation la menace maintenant de disparition. Nous avons proposé de prendre une maîtrise d’ouvrage déléguée et chercherons des financements par le biais de notre fondation.
Problématique
État de péril imminent, non protégé MH. Une convention de délégation de maitrise d’ouvrage a été proposée par l’association RLA au conseil de l’ordre des avocats. Un nouveau devis est en cours.
Groupe dit Au puits doré
8 bis rue Au Péterinck
© Renaissance du Lille Ancien
Notice de Jeanne Vermeersch RLA 2015
« Au puits doré »
1710.
ISMH 1944
Linteau au-dessus de la porte d’entrée sur la droite du bâtiment. Bas-relief en pierre.
Représentation du Christ et de la Samaritaine près d’un puits. Le groupe est encadré de feuillage. Polychromie rouge encore visible sur les drapés.
Date sculptée dans la pierre en-dessous.
L’inscription « Au puits doré » a aujourd’hui disparue.
En danger sanitaire, manques, cassures
Contexte
Le plus remarquable groupe sculpté de Lille aujourd’hui en état de péril imminent malgré la protection ISMH. Remis en valeur dans les années 1980 quand la maison a été restaurée par Pierre Andrieux et Daniel Riedinger, il a ensuite subi les passages sauvages de câbles et un manque d’entretien évident. Les propriétaires y demeurant n’ont jamais répondu à notre proposition de les aider. Nous allons leur proposer de prendre la maîtrise d’ouvrage déléguée.
Problématique
La situation est catastrophique pour ce groupe remarquable sanitairement en état d’urgence absolue. Il faut absolument procéder à la consolidation pour arrêter l’érosion avant les gelées de cet hiver. Il faut aussi faire pression sur les propriétaires pour les pousser à agir ou à déléguer la maîtrise d’ouvrage en les plaçant devant leurs responsabilités dans la dégradation d’un immeuble protégé. À ce stade de décomposition de la statuaire, il faudra sans doute songer à une restitution même sommaire des parties manquantes, notamment du bandeau portant l’inscription. L’administration va dresser un courrier aux propriétaires. La RLA va proposer à nouveau une délégation de maîtrise d’ouvrage. Le bandeau portant l’inscription sera restitué pour le rendre lisible. Un devis est en cours d’étude.
Saint Joseph
6 rue Saint-Joseph
Notice de Jeanne Vermeersh, RLA 2017
1665-1666
À gauche du premier étage au niveau accolé à la façade de la maison de gauche.
Groupe sculpté en pierre.
Taille de 30 cm environ.
Saint Joseph tenant la main à Jésus enfant. Ils sont vêtus de tuniques avec les chevilles apparentes. Joseph retient un drapé avec sa main gauche.
Ils reposent sur un socle ouvragé, arrondi avec une ligne en ressauts au niveau supérieur. Au-dessus d’eux, le commencement des deux drapés qui les encadre.
La sculpture est protégée par un petit auvent ajouté postérieurement.
Mauvais état.
Pertes de matière nombreuses. Manques.
Le groupe sculpté est très peu visible et déchiffrable.
Contexte
Maison proche du rivage dont la pente de la rue rappelle l’existence.
Un permis de construire a été demandé pour ravalement de la façade. Il serait opportun d’y jumeler la restauration du groupe et le confortement du auvent.
Problématique
Le groupe, ISMH, est miraculeusement à peu près intact grâce au auvent qui le protège du ruissellement et de la pluie directe. Il faut le traiter d’urgence pour éviter la dégradation qui s’est mise en route et refaire un auvent mieux adapté. Une étude est en cours et un devis sera proposé.
Notre-Dame de la Treille
10 rue de la Monnaie
Notice de Jeanne Vermeersch RLA 2017
Notre-Dame de la Treille.
1880 par l’architecte Bouillet.
Entre les deux fenêtres du premier étage.
Niche en stuc pastiche néo-gothique.
Socle à 3 niveaux formant une clé pendante sculptée de décor gothique.
Niche surmontée d’un édicule en pierre surmontée d’un haut pinacle.
Face à la statue devait se tenir une treille en pierre aujourd’hui partiellement disparue.
La statue en bois présente une Vierge à l’enfant qu’elle tient sur son côté gauche. Elle est trônant et couronnée. Elle est vêtue d’un long vêtement drapé. Elle a la tête légèrement penchée vers son fils. Jésus a la main gauche levée, il est assis, les genoux pliés et les pieds posés sur les genoux de sa mère. La main gauche de la Vierge le retient à l’arrière.
Mauvais état.
Perte de matière.
Encrassement.
Contexte
La propriétaire était volontaire en 2014 pour une restauration de l’édicule en stuc. Nous avions bien avancé avec notre fondation pour aider au financement. Un accord était en vue pour que la statue en bois soit déposée et mise en sécurité au local de la Renaissance du Lille Ancien afin de la préserver d’un vol éventuel et de la lente dégradation due aux intempéries, mais un détail administratif a ajourné l’opération. Nous aurions financé une copie en résine. Il faut relancer les négociations.
Problématique
Pas de problématique particulière hors la décision ou non de déposer la statue pour la mettre en lieu sûr, validée par les services de l’État. Dans la mesure où notre fondation serait l’opérateur financier, il serait logique qu’elle soit en dépôt à l’association avec convention précisant une mise en dépôt finale au musée de l’Hospice-Comtesse en cas de disparition de l’association. On peut ici aussi envisager une maîtrise d’ouvrage déléguée pour débloquer la situation.
Fantôme d’une niche monumentale
7 rue de la Collégiale
Notice de Jeanne Vermeersch RLA 2015
Niche en pierre dans la façade.
Entre les deux fenêtres du premier étage.
On peut voir qu’un décor l’entourait pour la mettre en valeur. On voit encore les traces sculptées de la coquille qui se trouvait dans le cul de four de la niche.
Niche vide.
Mauvais état. Manque de matières.
Cassures.
Contexte
Buchée avant d’être masquée par un enduit, la niche a été redécouverte lors de la restauration de cette façade par l’architecte du patrimoine François Bisman. Les vestiges ont été soigneusement et habilement préservés, permettant une lecture de tous les détails et éléments, y compris les profils et la mouluration des larmiers, rendant possible une restitution dont François Bisman a établi le dessin. Les anciens propriétaires étaient favorables, il faut contacter les nouveaux.
Problématique
Faut-il restituer ? Dans l’état actuel les vestiges sont illisibles et non signifiants, mais cependant assez nombreux et clairs pour une restitution de toutes les moulurations sans se tromper. Cela rendrait une harmonie à une façade que ce fantôme dénature. La monumentalité rare de cette niche plaide pour une restitution qui lui donnerait une vraie présence dans une rue un peu vide. La finesse du travail de restauration sur cette façade a permis de conserver tous les témoins plaidant pour qu’on aille jusqu’au bout. Les services de l’État sont favorables à la restitution des moulures disparues pour passer du plat au volume.

Pour un résultat rapide de cette opération pilote de sauvetage, la RLA a besoin d’urgence de réunir 50 000 €. Vous pouvez l’aider à y arriver !
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Renaissance du Lille Ancien
20-22 rue de la Monnaie,
59000 Lille
03 20 51 43 57